La Renaissance naît en Ombrie

Traditionnellement nous situons l’origine de la Renaissance au XV° siècle à Florence en Toscane. Les plus pointus d’entre nous iront même jusqu’à préciser le lieu, la chapelle des Pazzi, et l’artiste, Masaccio. Nous savons également sans vraiment bien les placer que quelques prémices se sont manifestées dans le siècle qui précède. Un nom d’artiste nous vient à l’esprit : Giotto, fin  XIII° et début du XIV° siècle. Mais où ? Comment ?

La révolution artistique qui a accompagné cette période est l’expression d’une révolution de la pensée qui s’est épanouie à travers la figure d’un saint, François d’Assise, dont la spiritualité a agi comme un véritable électrochoc sur ses contemporains.

C’est en Ombrie que tout a commencé. Patrie de saint François aux chemins mille fois arpentés par ses compagnons et lui… Un petit coin de soleil à la nature généreuse coincé entre deux voisins à la renommée éblouissante : la Toscane et le Latium.

En s’engageant au service de l’humanité et en vivant « dans le siècle », en louant la beauté de la Création, François se détourne d’un monde médiéval où les regards se portent exclusivement vers l’au-delà.  Cette spiritualité qui place la création et l’homme au centre trouve un écho retentissant dans le monde de l’art où les peintres et les sculpteurs abandonnent la représentation stylisée d’un monde surréel pour s’attacher à la représentation du monde réel.

Et c’est Giotto, en décorant les murs de la basilique Saint-François d’un cycle de fresques sur la vie du saint qui créé une nouvelle langue picturale ! En un seul espace en deux églises superposées aux murs et plafonds recouverts de fresques (le Maître de Saint-François, Cimabue, Giotto, Pietro Cavallini, Pietro Lorenzetti, Simone Martini…), on assiste à l’émergence d’une révolution picturale qui s’accompagne de balbutiements et de maladresses profondément émouvantes.

Un siècle plus tard, la Renaissance s’est pleinement épanouie en Ombrie. Le voyageur culturel qui rêve de pouvoir admirer en toute quiétude, loin des foules, les fresques admirables de grands maîtres comme Pinturicchio, Filippo Lippi, Benozzo Gozzoli, Le Perugin et Raphaël,  se doit de séjourner dans la région.

Imaginez ! Vous vous arrêtez sur une petite route de campagne. Un monastère paisible. La petite église est fermée. Vous sonnez à l’hôtellerie. Une sœur vient vous ouvrir. Vous demandez à visiter l’église qu’elle vous ouvre volontiers. Elle vous invite à la prévenir de votre départ et vous laisse seul dans les lieux… Seul avec deux fresques merveilleuses de Filippo Lippi.

Ainsi est l’Ombrie : des oliveraies, des vignobles, des villages médiévaux lovés sur les sommets et des églises qui dévoilent leurs merveilles à ceux qui veulent bien se laisser détourner des destinations culturelles traditionnelles.

Madeleine Troude