Régis Debray dit que le désert est intransigeant comme la vérité, qu’il est un lieu idéal d’élection, de simplicité et d’ascèse car son dénuement atteste l’effort de purification intérieure.
Parmi les rares déserts que la situation politique mondiale autorise, le Maroc a l’avantage d’offrir un itinéraire qui s’appuie sur l’expérience fondatrice de Charles de Foucault, à l’origine de sa conversion.
Sa soif d’aventures et de nouvelles découvertes l’ont conduit à risquer sa vie et à endosser le costume et les rituels d’un juif errant pour pouvoir explorer le Maroc interdit aux chrétiens. Ému par la beauté des paysages et la piété musulmane, il a ressenti cet appel de la pureté qui l’a guidé sur les bancs de l’église Saint-Augustin de Paris et mené à la conversion.
Mettre ses pas dans les pas de Charles de Foucauld le temps d’un pèlerinage, c’est devenir « un porteur de sandales » et faire l’expérience du silence.
Partir de Fès, s’enfoncer dans le Moyen-Atlas et atteindre le Haut-Atlas pour aller à la rencontre de ces communautés monastiques qui ont choisi de partager la vie simple du peuple berbère et de mettre leurs compétences à son service. Ces communautés sont fidèles à la vocation de discrétion du père de Foucauld dont elles ont adopté l’idéal de présence respectueuse détachée de toute ambition prosélyte. L’itinéraire prend une dimension initiatique. Il enjoint le pèlerin à s’abandonner à la beauté de la nature où l’aride se transforme ici et là en oasis par la grâce de l’eau.
De la douceur dorée de Fès, cité impériale débordante de vie dont la médina reste inchangée depuis le XII° siècle, en chemin vers les terres arides où ciel et terre s’unissent, le pèlerin s’exile de son monde familier. Il se dépouille et se dépasse pour une rencontre avec l’infini.
La découverte du peuple berbère, de son attachement mystique à sa terre et à sa liberté, de sa relation intime au sacré, donne l’impression d’être sorti du temps ordinaire et de se tenir au seuil d’un autre âge où le jour s’effile avec lenteur.
Madeleine Troude